Bosch dreams a été créé en 2016 à l’occasion de l’anniversaire des 500 ans de la mort du peintre médiéval Jérôme Bosch (Hieronymus van Aken). Lors de ce spectacle présenté par Les 7 doigts, la salle, ici le Théâtre de L’Olivier, joue le rôle d’un amphithéâtre empli d’étudiants. En tant qu’étudiants quelque peu indisciplinés, nous nous laissons emporter par nos rêveries lorsque le conférencier entreprend l’étude détaillée du triptyque Le Jardin des délices de Jérôme Bosch. Il analyse avec pertinence les moindres détails des tableaux et tisse des liens avec des créations inspirées par ceux-ci. Nous l’écoutons d’une oreille distraite, nos pensées nous entraînent alors au cœur du triptyque. Le tableau se brouille et prend vie sous nos yeux comme envahi par notre esprit embrumé.
La première scène nous donne à voir, un homme alité, toussotant, entouré de personnages inquiétants qui s’éloignent dés que l’homme semble reprendre conscience. Les tableaux oniriques de Jérôme Bosch sont peuplés de créatures merveilleusement étranges. Les scènes se succèdent et nous plongent dans un état contemplatif.
Le dispositif scénique est ingénieux, les artistes se produisent entre deux écrans, l’un disposé en fond de scène et le second en bord de scène. Dans une semi-pénombre les décors sont projetés sur ces deux écrans, ce qui permet d’intégrer parfaitement les personnages tout en camouflant les structures et agrès. La superposition des plans de projection nous plonge dans l’univers des peintures. Le jeu de transparence crée une profondeur. Les artistes interagissent avec ces décors projetés.
Le conférencier nous apporte ses lumières sur certaines créations. On découvre le lien entre la chanson Riders on the storm de Jim Morrison ou encore la peinture de Salvador Dali et l’œuvre picturale de Jérôme Bosch. Il nous révèle la présence de certaines allégories et décrypte les secrets des tableaux. Au fur et à mesure du spectacle, on découvre la relation entre le père conférencier histoire de l’art et sa fille.
L’univers fantastique et fabuleux de Bosch est parfaitement retranscrit dans ce spectacle. Son riche bestiaire prend vie en créant une sensation de foisonnement. On retrouve également la végétation luxuriante des tableaux. La dualité de l’enfer et du paradis accueille faune et flore fantasmagoriques.
Les transitions sont fluides. Au cours du transport d’une meule de foin, une roue s’échappe de la carriole. Le personnage la poursuit jusqu’à en sortir du tableau. Elle se transforme ensuite en roue Cyr*. Tout comme la roue, les éléments issus du vocabulaire pictural de Jérôme Bosch sont autant de prétextes à l’introduction d’agrès circassiens. Ainsi, une clef se métamorphose en cerceau aérien.
Les performances circassiennes s’intègrent toujours parfaitement à la toile de fond. Les artistes sont également incrustés dans les animations. On s’imagine aisément retrouver les artistes en image fixe sur les peintures d’origine. Les tableaux successifs accueillent du main à main, de la jonglerie du trapèze, de la roue Cyr*, du mât chinois … J’ai beaucoup apprécié le numéro d’équilibre sur cannes au creux d’une bulle. Poitrine nue, l’équilibriste aux longs cheveux blonds, a l’apparence des personnages féminins peints par Jérôme Bosch.
Ce spectacle nous propulse hors du temps dans un véritable tourbillon visuel. Des illusions d’optiques contribuent à l’immersion. Notamment lorsque un homme élégant avec sa canne, inspiré de Salvador Dali, fait du sur-place sur scène, c’est le mouvement du décor qui va donner l’impression que l’homme se déplace dans le musée et s’approche d’un tableau.
Le teaser m’avait donné très envie de voir Bosch dreams mais j’avais peur de ne pas autant retrouver l’esprit des tableaux dans le spectacle. Je n’ai absolument pas été déçue car les animations des peintures de Jérôme Bosch, réalisées par Ange Potier sont remarquables.
Une coproduction : Les 7 Doigts, Theatre Republique / Idée originale et concept : Samuel Tétreault / Scénario : Samuel Tétreault, Martin Tulinius et Ange Potier / Direction artistique et mise en scène : Samuel Tétreault / Consultation dramaturgique : Simon Boberg / Support à la mise en scène : Charlotte Bidstrup, Olaf Triebel et Matias Plaul / Vidéo et animation : Ange Potier / Masques, costumes et décors : Ange Potier / Textes : Samuel Tétreault, Martin Tulinius et Simon Boberg / Artistes : Vladimir Amigo, Kerren McKeeman, Sunniva Byvard, Rémy Ouellet, Mathias Reymond, Mattias Umaerus, Leah Wolff / Direction de tournée : Sophie Côté / Direction technique et chef machiniste : Simon Carrière-Legris / Régie plateau : Mia-Luise Heide / Son et vidéo : Magnus Hansen / Régisseur lumière et opération : Karl Sorensen / Gréage : Ariellah Winther / Création lumière : Sunni Joensen / Création sonore : Janus Jensen / Accessoires : Mette Hammer Juhl / Réalisation des costumes : Bente Nielsen / Kristine Widriksen / Costume du monstre poisson : Mathieu René / Réalisation des masques : Karin Ørum / Maquillages et ailes : Line Ebbesen / Musique : Claire Gignac – La Nef, Nans Bortuzzo, Vivian Roost, The Doors, Philip Glass, Ahn Trio, Grapelli, Duke Ellington, Tom Waits, ChillyGonzales / Production exécutive : Theatre Republique / Production déléguée pour la tournée : Les 7 doigts de la main
Sur une invitation du Festival Circolo, Hollande
Avec le soutien de Wilhelm Hansen Fonden et la Fondation Jerhonimus Bosch 500
Avec le support du Conseil des arts du Canada, Conseil des Arts de Montréal et Conseil des arts et des lettres du Québec.